vendredi 5 octobre 2007

Les défis de la jeunesse chilienne ne sont pas, a priori, bien différents des nôtres. Parmi cette génération qui naquit trois ou quatre ans après le coup d’état, nombreux sont ceux qui, aujourd’hui, ont terminé ou termineront leurs études et trouveront un poste assez bien rémunéré dans le secteur tertiaire. Ils vivront sans trop de difficultés dans un pays relativement compétitif sur le marché économique mondial, assez semblable, vu du centre de sa capitale, à nos contrées européennes occidentales.

De l’autre côté, comme partout, il y a les abandonnés du système, ceux qui n’ont pas fait d’études, tout juste, peut-être, l’école obligatoire – payante depuis la maternelle, au Chili, ce qui signifie que même l’école publique n’est pas à la portée de tous. Ils trouvent ici ou là un travail de garde de sécurité, débarrassent un chantier, font le coursier pour une grande entreprise. Ou ils ne trouvent rien, s’en remettent à la mendicité ou à la délinquance.

Et puis il y a la majorité, ceux de l’entre-deux, des milliers de jeunes qui, munis d’un bac, vivent depuis des années une double, parfois une triple vie pour joindre les deux bouts et arriver quelque part. Ceux que je connais travailleur huit heures par jour dans un call-center, dans une crèche, comme femme de ménage ou gardien de nuit. Sur la base de ce revenu (200 € par mois en moyenne), ils demandent un prêt pour 3 ou 4 ans d’études qui auront lieu le soir entre 19 et 23 heures. Le week-end, ils vendent sur les marchés des vieux habits, des jouets d’occasion, des articles récupérés dans les débarras des supermarchés ou du petit artisanat. C’est encore ce qui ramène le plus et le plus rapidement, ce qui permet, de temps en temps, d’organiser une petite sortie ou une grillade entre amis (la viande venant, elle aussi, d’un réseau parallèle). Alors certains abandonnent les études, le travail dépendant, d’autant qu’ils sont nombreux à avoir des enfants. Ils vivront de leur petit marché, en échappant au fisc, sans aucune couverture sociale. Le crédit d’études contracté, lui, ne sera pas effacé. Il traînera longtemps à côté des autres emprunts plus ou moins importants d’une génération qui s’efforce malgré tout de suivre, d’assumer certains frais minimaux de santé, et de faire face aux prix de la vie courante, alignés sur la réalité économique du nord plutôt que sur la leur. Une génération qui s’efforce, surtout, de sauver les apparences…

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