mardi 16 septembre 2008
Sur Cuba, bastion du socialisme pur et dur, j'avais tout entendu avant de visiter l'île. Et notamment à propos de la liberté d'expression, des risques que courraient les Cubains à critiquer le régime, ou à afficher leur sympathie vis-à-vis des Etats-Unis.
Certes, nous avons rencontré quelques personnes qui, en nous parlant des problèmes actuels de la vie sur l'île, baissaient la voix ou regardaient autour d'eux. Mais il convient de vous faire part de quelques observations qui nous ont nous-mêmes surpris, car en fait de terrible dictature autoritaire et bridant la liberté de pensée, on a vu pire.
Nombre de Cubains se promènent dans la rue avec des casquettes ou des t-shirts à l'effigie des USA: aigles, sigles US-Army, drapeau américain, parfois même sur fond de treillis militaire. Le coca, contrairement à ce qu'on pourrait croire, n'est pas du tout interdit ou introuvable sur l'île. Tous les restaurants ou presque en vendent, parfois même certains commerces. C'est idiot, car le Tukola cubain est bien meilleur. Mais voilà: les irréductibles de la marque américaine ne seront pas frustrés ici et les cannettes de coca ne sont pas dix fois plus chères que celles de tukola, qu'on se le dise.
Dans les boutiques de La Havane, vous trouverez du Ralph Lauren, du Nike ou du Reebok, pour autant que vous en ayez les moyens (comme partout). Ces articles sont en vitrine.
A la télé cubaine, d'excellente qualité dans l'ensemble, on diffuse à partir de 22h des films américains (en général assez bons) en langue originale et sous-titrés en espagnol. Nous avons par exemple vu une partie du Barbier (je ne sais plus le titre exact), avec Johnny Depp. Notre hôte à La Havane, professeur d'histoire à l'Université, auteur des livres dans lesquels les jeunes Cubains apprennent l'histoire, regardait la version espagnole de la chaîne brésilienne Globo.
Il est en revanche interdit de se procurer grace à une parabole ou à un décodeur certaines chaînes des Etats-Unis, et notamment celle diffusée par les Cubains de Miami. Disons-le clairement, nombre de Cubains la regardent, à plein volume, fenêtre ouverte. Avec le nombre de policiers qui passent dans les rues, si ces actes de "subversion" étaient systématiquement et sévèrement punis, les contrevenants seraient plus discrets.
Autre chose encore: les lois sur la restauration sont très sévères sur l'île. Il y a des restaurants officiels, des maisons d'hôtes qui prennent une licence pour offrir également la restauration (c'est le cas de celle où nous logeons actuellement), et des "paladares", maisons particulières qui acquièrent une autorisation pour mettre à la disposition des touristes quelques tables. Dans ces derniers établissements, on ne doit normalement pas servir certains plats réservés aux restaurants (fruits de mer, langoustes), pour ne pas faire de concurrence. Or dans toutes les villes, à tous les coins de rue, non seulement on vous offre des fruits de mer à tour de bras, mais en plus les restaurants illégaux sont légion, à tel point que dans une petite ville comme Trinidad, il est presque difficile de trouver un paladar officiel. On vient vous chercher dans la rue, on vous donne le prix du plat de langouste, et ce sans complexe, devant les voisins, les passants, et à une telle fréquence qu'ici encore, il semble que la "répression" ne soit pas une réalité trop inquiétante pour la majorité des Cubains. A la limite, c'est le restaurateur honnête, avec permis, qui est le plus souvent tracassé par des controles de toutes sortes.
Même observation pour les faux taxis, particuliers qui vous offrent des excursions à des prix plus chers que les agences officielles, et qui sont à tous les coins de rue. Ceux-ci ne se cachent pas et ne regardent pas autour d'eux pour vous faire leur offre. Pas plus que les mendiants, en principe interdits.
A tel point qu'on en vient à se demander s'il n'y a pas un peu de mise en scène de la part de ceux qui chuchotent de petites critiques du régime en vous donnant l'impression qu'il y a des espions cachés partout...
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Cartographie: Carnets de route, Cuba par mots et par vents
3 Commentaires:
mais tu sais bien que ce n'est pas au noombre de tee shirt yankee, ou à l'accès de produits de marque que l'on mesure la liberté ou la démocratie d'un pays.
D'abord, les Cubains n'élisent pas leur président.
Ensuite, il n'y a pas de pluralisme.
Aucun parti politique autorisé.
Sans compter les détenus pour raisons politiques.
Pas non plus de réelle liberté de la presse.
Ces seuls aspects suffisent à dire que si Cuba a de nombreux points positifs, il en a aussi de sacrément négatifs.
L'armée, la policie et le parti unique ont beaucoup trop de pouvoir à mon goût.
On peut aussi constater que les Etats-Unis elisent librement leur president, que les partis y sont autorises, qu'il y a la liberte de la presse, etc., et que j'ai deux amis Venezueliens qui, en transit par les EU vers la France, il y a 3 ans, ont passe 3 jours chacun dans une cellule d'isolement avec des questions, toujours les memes, repetees sans fin, sans pouvoir dormir, parce qu'ils avaient le tort d'etre Venezueliens.
Je ne dis pas que Cuba est le pays ideal.
Je dis juste qu'il faut relativiser notre vision des choses et voir aussi ce qui se passe chez nous.
Regarde mon recent message sur une perquisition, en Suisse, vraisemblablement demandee par le gouvernement colombien, chez deux refugies qui avaient ose critiquer ouvertement Uribe...