jeudi 11 septembre 2008
Au début de notre sejour, nous vous parlions des différentes manières grâce auxquelles certains Cubains se procurent des CUC (monnaie convertible forte, celle des touristes, mais dont les Cubains doivent se servir pour acheter nombre de produits). Je souhaiterais ici préciser un certain nombre de points, d'abord parce que mon article ne voulait en aucun cas montrer du doigt ces pratiques, souvent plutôt amusantes (ou désolantes, si l'on se place du point de vue de celui qui en est réduit à les utiliser), et puis parce que nous avons rencontré des touristes détestables qui ne savent rien de la situation économique de l'île et se comportent souvent de manière abjecte avec les Cubains.
Premièrement, il faut savoir que les Cubains sont payés et vivent avec une monnaie nationale, le peso cubain, que le touriste n'aura en général pas besoin d'utiliser, sauf pour acheter des fruits, du riz, des haricots dans les marchés pour Cubains. Actuellement, 1 CUC (monnaie touristique équivalente au dollar américain) vaut 24 pesos cubains. Le salaire des Cubains est variable, mais contrôlé de maniere à éviter des inégalités trop flagrantes. Un professeur d'université est payé 800 pesos (un peu moins de 40 CHF par mois). Un gardien de musée environ 300 pesos. En plus de son salaire, chaque Cubain recoit chaque mois un carnet d'alimentation qui donne droit, pour chaque personne vivant sur ce revenu, à 8 oeufs, 500 gr. de poulet, 250 gr. de riz, 1 bol de haricots noirs, du sel, du sucre, 200 gr. de café, un petit pain par jour, du lait pour les enfants jusqu'a 7 ans, un quart de litre d'huile, un savon un mois sur deux, une dose de poudre à lessive un mois sur deux, 1 tube de dentrifrice pour 3 personnes tous les 3 mois, un demi-litre de détergent universel tous les 6 mois. Dans les magasins reservés aux Cubains, ceux-ci peuvent bien sûr acheter un peu plus de chaque chose avec leur salaire, puisque les éléments du carnet ne couvrent pas les besoins mensuels. Le gros problème est l'achat des habits, de boissons en bouteille, de produits cosmétiques ou nettoyantes divers, sans parler des livres, cahiers, stylos, etc., qui ne peuvent être acquis qu'en CUC. Les Cubains ont donc besoin de CUC. Ceux qui travaillent directement avec les touristes en ont facilement. Les autres doivent les trouver d'une manière ou d'une autre, d'où certains procédés un peu limite parfois, ou une insistance à rendre des services moyennant rémunération.
Toutes choses finalement compréhensibles pour peu qu'on observe, qu'on discute, et qu'on essaie de donner directement le bien manquant: t-shirts, habits, chaussures, savon, dentrifrice, brosses à dents, etc. La gratitude est souvent mille fois plus visible que si l'on tend un billet. Essayez un peu de donner un savon à une mendiante des Saintes-Maries-de-la-Mer et vous me raconterez...
Encore un exemple concret de cette situation économique difficile. Nous avons rencontré à Cienfuegos un conducteur de calèches qui nous a fait decouvrir la ville, nous a amenés chez des Cubains ou nous avons mangé comme des princes, nous a donné de nombreuses indications précieuses. Il est architecte. Sa femme urgentiste. A eux deux, ils gagnent moins en un mois que lui avec son cheval en un week-end, transportant des touristes (ce qu'il n'a absolument pas le droit de faire). En utilisant son taxi, on le fait donc entrer dans l'illégalité. S'il se fait remarquer par la police, l'amende peut être sévere. Mais on rencontre un Cubain, on discute, on échange, on donne un savon ou un pull et, concrètement, avec les dix CUC qu'on laisse pour toute une soirée passée à découvrir, on aide...
Certains touristes prennent très mal cette situation, se fâchent contre l'insistance de ceux qui offrent leur service, contre l'inégalité des prix Cubains / touristes. Ce sont ceux dont le principe de voyage est un billet d'avion cher contre 3 semaines de vie pour rien. Ceux qui voudraient que tout en maintenant un blocus infame contre cette île, on vienne ici se bronzer sur les plages, danser, manger des fruits de mer, au même prix que les Cubains... qui ne peuvent pas faire tout cela!
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Cartographie: Carnets de route, Cuba par mots et par vents
1 Commentaire:
C'est marrant, amis en 98, quand j'étais à La Havane, ils disaint "convertible" pour la monnaie.
Mais j'avais trouvé diaboliquement malin de la part de Fidel de créer une "fausse" monnaie, le CUC, quasiment comme faire du faux dollar...
Hélas, cette "fausse" monnaie entretient une situation plus qu'embarrassante pour les Cubains comme pour les touristes.
Mais je me souviens que j'avais également choisi d'offir nopn pas de l'argent, mais des choses utilses pour l'hygiène, la santé et l'éducation, chose qui n'onbt pas de pris.
Continue à nous faire passer le témopignage nécesaire de la vie cubaine de 2008.